COMMUNIQUE DE PRESSE
La punition collective : un non-sens éducatif et un déni de droit
Par le biais d'une modification de circulaire qui commente la nouvelle composition
des conseils de discipline, le ministre de l'Éducation nationale réintroduit
subrepticement la possibilité d'infliger des punitions collectives.
Certes, le ministre rappelle " qu'il est utile de souligner le principe
d'individualisation de la punition ou de la sanction ". Mais c'est pour
ajouter aussitôt dans le paragraphe intitulé " moyens d'action
à la disposition des enseignants en matière disciplinaire ",
" qu'une punition peut être infligée pour sanctionner le
comportement d'un groupe d'élèves identifiés qui, par
exemple, perturbe le fonctionnement de la classe. Par ailleurs, dans le cadre
de l'autonomie pédagogique du professeur, quand les circonstances l'exigent,
celui-ci peut donner un travail supplémentaire à l'ensemble
des élèves ".
Ainsi, très clairement, " le travail supplémentaire "
donné " à l'ensemble des élèves ", est
envisagé comme un moyen d'action en matière disciplinaire.
Cette disposition, qui cherche un alibi un peu grossier dans " l'autonomie
pédagogique du professeur ", constitue un recul sans précédent,
à la fois du point de vue de la justice, du point de vue de l'autorité
de l'enseignant et du point de vue éducatif :
- elle contrevient au principe de l'individualisation des sanctions, selon
lequel " toute sanction, toute punition s'adressent à une personne
; elles sont individuelles et ne peuvent être, en aucun cas, collectives
" (circulaire n° 2000-105 du 11-7-2000) ; plus largement, elle est
contraire aux principes fondamentaux du droit français ; de surcroît,
en introduisant la notion de " travail supplémentaire " comme
un moyen d'action de nature disciplinaire, elle rétablit une confusion
dommageable - et condamnée dans la circulaire déjà citée
- entre " les punitions relatives au comportement des élèves
" et " l'évaluation de leur travail personnel " ;
- cette disposition bat en brèche l'autorité des chefs d'établissement
et des enseignants, que le ministre se targue par ailleurs de réhabiliter
: en offrant cette solution de facilité et en contraignant à
ce constat d'impuissance que constitue la punition collective, il pourrait
laisser entendre que des équipes pédagogiques sont incapables
d'anticiper une situation, de gérer un conflit et de cerner les responsabilités
;
- enfin, le recours à la punition collective, outre un aveu implicite
d'échec, est contre-éducatif en tant qu'il incite dans la quasi-totalité
des cas à la délation : la seule alternative consiste à
dénoncer autrui, ou à subir collectivement la punition.
Élèves, enseignants, parents, chefs d'établissement,
personnels d'éducation ont travaillé longtemps ensemble pour
établir les règles les plus justes et les plus équilibrées
en matière disciplinaire. Ils ont prévu ensemble des procédures
alternatives au conseil de discipline, qui visent à anticiper les conflits,
à les traiter à la racine, et à les résoudre d'abord
et avant tout dans une perspective éducative. Cette tâche est
difficile, délicate et requiert la mobilisation de toute la communauté
éducative.
Cette dernière ne peut accepter qu'on fragilise la vie de l'établissement
scolaire par des mesures qui, conjuguant l'autoritarisme et l'arbitraire,
engendrent l'injustice.
Signataires (auxquels s'associe bien entendu INTERMEDES) : CEMEA, CRAP-Cahiers pédagogiques, DEI-France (Défense des enfants international), Éducation & Devenir, FCPE, FERC-CGT, FOEVEN (Fédération des œuvres éducatives et de vacances de l'Éducation nationale), GFEN (Groupe français d'éducation nouvelle), ICEM-Pédagogie Freinet (Institut coopératif de l'école moderne), Ligue de l'enseignement, Ligue des droits de l'Homme, OCCE (Office central de la coopération à l'école), SNPDEN-UNSA, UNL.
Contacts Presse :
FCPE : Laurence Guillermou, tél. : 01 43 57 16 16
DEI-France : dei@bernard-defrance.net